Je passe actuellement deux semaines à Antananarivo, ou Tana pour les intimes, au couvent des filles de la Charité du Sacré-Coeur Jésus. Sœur Florine, religieuse depuis près de vingt-cinq ans, m’y accueille et fait tout son possible afin que je m’y sente comme chez moi.
Je suis venue ici pour me mettre au vert, après un grand road trip en Afrique Australe, que je termine un peu cassée. Quoi de mieux qu’un couvent pour trouver un peu de repos. J’avais également envie de découvrir cette vie communautaire, si différente de la mienne, et de tenter de comprendre cette foi qui pousse tant de jeunes femmes, ici à Madagascar, à s’engager comme serviteur de Dieu auprès de leurs prochains.
Je ne suis pas ici pour prier, n’étant adepte d’aucune religion, mais en y réfléchissant bien, je suis peut-être à la recherche d’une forme de spiritualité plus poussée, et je suis probablement venue puiser un peu d’énergie dans cette force dont font preuve chaque jour ces sœurs. Voici un peu de leur vie…
La vie au couvent :
Voici comment se déroule une journée-type chez les sœurs :
- 4h : lever et oraison (prière personnelle)
- 5h10 : office (prière communautaire)
- 5h45 : messe à l’église
- 7h : petit-déjeuner puis vaisselle
- 8h à 12h : les sœurs vont travailler à l’école et au dispensaire qu’elles gèrent
- 12h : repas puis vaisselle
- 14h à 17 h : reprise du travail à l’école et au dispensaire
- 17h : oraison (prière personnelle)
- 18h : vêpres (prière communautaire)
- 18h45 : dîner, vaisselle, puis coucher
La vie communautaire est donc bien réglée, et laisse peu de place à l’improvisation.
Une chose est sûre, ce programme chamboule un peu mes habitudes. Moi qui voulait me mettre au vert, je suis servie.
Je prends peu à peu la mesure de cette foi qui semble inébranlable, même si certaines me confieront que le doute et les tentations sont parties intégrantes de leurs vies. Peut-être est-ce cela qui rend leur engagement encore plus beau, encore plus grand.
Avoir la foi :
Les sœurs les plus jeunes ont tout juste dix-huit ans. Cela me pousse à réfléchir, et à me demander ce qui peut bien motiver une jeune fille de cet âge à mettre de côté tout un pan de sa vie, pour s’engager auprès de Dieu.
Je pose timidement la question à Sœur Florine, et lui demande pourquoi a-t-elle fait ce vœu, lorsqu’elle était encore si jeune.
Ma maman est décédée le jour de ma naissance, en me mettant au monde. Dans mon village, il y avait un puissant tabou : quand une mère décédait en accouchant, l’enfant devait être tué ou abandonné. Une réunion a eu lieu, avec tous les villageois, pour savoir ce que l’on allait faire de moi, et si quelqu’un pouvait m’élever. Une vieille femme a alors pris la parole, et a dit qu’elle pouvait me prendre avec elle, dans sa maison, bien qu’elle ne soit pas de ma famille. Les miens m’ont reniée, ce jour-là, et j’ai suivi cette femme qui m’a élevée chaque jour, comme si j’étais sa fille.
Toutefois, mon père ne parvenait pas à me laisser partir ainsi, et après que tout se soit calmé, qu’un bœuf ait été tué et que le linge funéraire ait été lavé, il m’a suivie dans ce nouveau village, auprès de cette femme devenue ma maman. Jusqu’à l’âge de quinze ans, elle m’a élevée, et mon père était à côté.
À quinze ans, on m’a raconté mon histoire et c’est ainsi que j’ai désiré être religieuse, pour m’occuper des orphelins comme cette dame l’avait fait pour moi. C’est cette dernière qui m’a appris le catéchisme. Mon père était païen, c’était même un voyant. Et je suis la seule baptisée de la famille. C’est ainsi que j’ai dit à ma mère que je voulais être religieuse. Elle était d’accord, et m’a juste dit que si je commençais, je devais continuer par la suite. Je suis allée voir des sœurs à Andapa, dans le nord, c’était en 1974, et je suis rentrée au couvent. Ma maman est décédée avant que je ne devienne religieuse. Elle avait deux autres filles, qui m’ont également toujours prise sous leurs ailes.
Je suis retournée voir la tombe de ma première maman, après deux ans passés au couvent, avec mon frère. Ce jour-là, ma famille m’a demandé pardon pour leur comportement passé. C’est un peu comme l’histoire de Moïse, jeté dans l’eau puis recueilli par quelqu’un. Je leur ai demandé qu’on n’abandonne plus les enfants pour cette raison, et je leur ai dit que si ma maman était décédée lors de ma naissance, c’était parce que le seigneur l’avait appelée, et il appelle chacun au moment où il le veut.
Projets et recherche de volontaires :
Deux actions sont menées de front par les sœurs du couvent. Tout d’abord, il y a tout un travail effectué au dispensaire, qui connaît actuellement une fréquentation moyenne. Les sœurs recherchent du personnel médical et paramédical afin de leur prêter main forte.
La seconde mission qui leur tient à cœur est la gestion de leur école, qui accueille 1600 enfants de trois ans et demi à dix-huit ans. En comptant les sœurs, cinquante-huit enseignants y travaillent chaque jour. Un volontaire serait plus que bienvenu, afin d’accompagner les professeurs dans leur enseignement pédagogique, de participer à l’entretien de l’école, et pourquoi pas d’assister le secrétariat si le volontaire est disponible sur une longue période. Jeunes, moins jeunes et retraités, chacun peut venir apporter son soutien quelques temps, aucun diplôme n’est requis, seuls la motivation et le sérieux dans l’engagement comptent.
Il est possible d’être hébergé sur place au couvent, dans de bonnes conditions, contre une petite participation financière (qui couvre surtout la nourriture, trois repas par jour), cela peut-être une très bonne option pour un premier voyage seul en Afrique.
Sœur Florine m’a également fait part de sa difficulté à recevoir les paiements des parents, lors des inscriptions à l’école. Les sœurs recherchent des parrainages pour aider les familles les plus démunies.
Recherche de coopérants pour des cours de français :
J’ai eu également l’occasion de rencontrer Sœur Virginie, qui appartient à la même congrégation, mais qui vit dans une communauté un peu plus éloignée, à quelques kilomètres de là.
Cette dernière m’a confié son souhait d’accueillir un coopérant étranger, afin d’enseigner les bases du français aux pré-postulantes (jeunes filles qui s’apprêtent à devenir sœurs).
La mission durerait environ trois mois, pour des filles âgées de vingt à vingt-quatre ans (onze filles en 2015, puis cinq prévues en 2016). Ces jeunes étant en vacances aux mois de juillet et août, Sœur Virginie recherche une personne disponible sur une période de trois mois comprise entre septembre et juin.
Le bénévole n’est pas censé participer aux offices religieux (sauf s’il le souhaite) ni être catholique, seule la maîtrise de la langue française est nécessaire pour postuler.
Les frais de voyage resteront à la charge du volontaire et une participation financière lui sera demandée pour compenser son hébergement ainsi que sa nourriture. L’enjeu pour le bénévole étant bien sûr de découvrir une partie de la culture malgache en vivant une expérience enrichissante, basée sur la rencontre avec l’autre. Cela peut aussi être l’occasion de faire un premier pas dans le domaine de la solidarité internationale, car les sœurs travaillent beaucoup avec les populations fragilisées.
Sœur Florine : +261(0)324526160 et +261(0)342975132
ou par mail : flora.zafy@yahoo.fr
Sœur Virginie : +261(0)324814488
Je quitterai le couvent lundi, je vais prendre un vol pour Istanbul, où Emily, la couchsurfer suédoise avec qui j’ai bien sympathisé, m’attend. On prévoit de faire Istanbul – Orléans en stop, juste parce que ça sonne bien. Retour en Europe donc, avec un petit pincement au cœur, dur de quitter cette Afrique toujours si surprenante.
Un grand merci à Sœur Florine, et à toutes les sœurs qui m’ont accueillie ici à Tana, je garderai un souvenir impérissable de notre rencontre, et je quitte votre belle île rouge, grandie, cette fois encore. Merci mille fois… Misaotra…
Quelle aventure que de vivre dans un couvent sans avoir de convictions religieuses.
La vie coule comme un long fleuve sans aucune vague possible vu l’emploi du temps imposé.
As-tu été donné des cours de français aux postulantes? L’expérience doit vraiment en valoir la peine!
Retour vers l’Europe donc? Un peu de changement et de renouveau pour ces nouvelles destinations!
Coucou! Non je n’ai pas donné de cours de français à proprement parler mais j’ai aidé les postulantes à faire les devoirs et d’autres choses du genre 🙂 En tout cas, c’était bien cool! Oui retour vers l’Europe, gros choc culturel! Bises d’Istanbul!
salut ma toute belle. comment va tu. je me pose souvent la question. je me demande souvent ou tu es dans ce grand univers rempli de mysteres. ici dans notre petit monde cela est toujours pareil, nanuk grossi, il est comme un adulte mais tres enjoué. aurevoir grosse bise, encore grosse bise.
Salut Jacques! Comme je suis contente d’avoir de vos nouvelles! Et celles de Nanuk bien sûr… Il a dû beaucoup grandir depuis que j’ai quitté le Québec… Comment allez-vous? Ici tout va bien, je viens de remonter en Europe, je suis actuellement à Istanbul 🙂 Prenez bien soin de vous surtout… Amitiés 🙂
Très touché par tes commentaires sur le couvent.
Pour un peu je me laisserais tenter, mais ça ne serait pas raisonnable à mon âge
Grosses bises – Papi Gilbert
Haha je t’imagine bien pourtant faire une petite retraite au couvent! Gros bisous 🙂
Salut Astrid,
Tu avais des contacts avant pour choisir ce monastère ou bien tu as juste frappé à la porte comme ça, un peu au hasard ?
Et après Stockholm, retour à la maison ou bien tu continues sur les routes du monde ? Moi je vote pour que tu continues 😉
Coucou! Oui j’avais des contacts, mais à Mada tu peux aller dans n’importe quel couvent comme ça, ils tous tous des chambres, et si jamais ils n’en avaient pas ils te renverrai vers une autre communauté qui pourrait t’héberger, donc c’est super facile 🙂 Après Stockholm, qui sait…! Mais je prends ton vote en compte haha! Bonne route à toi si tu as de nouveaux voyages de prévus…?
bravo pour ce nouvel article si humain et circonstancié
j’envoie un petit mail d’encouragement à Soeur Florine
j’espère que tu es un peu reposée maintenant
grosses bises de ton Papi
C’est gentil ça va lui faire plaisir! Gros bisous