Prendre la route, c’est connaître des mois de bitume, de caillasse, d’autoroutes et de chemins boueux. Parcourir des dizaines de milliers de kilomètres, l’un après l’autre, comme de petites victoires sur mon défi de tour du monde qui paraissait si fou.
Rencontrer des centaines d’inconnus, de belles personnes qui m’ont changée, transformée. Et surtout, jouir d’une liberté totale, acquise non pas en partant, mais bien jour après jour, comme une reconquête de moi-même.
S’accepter tel que l’on est :
M’accepter fut le premier apprentissage de mon voyage initiatique. En recueillant une multitude de sourires chaleureux et en recevant tant d’encouragements, comment ne pas réussir à m’accepter telle que je suis ?
Prendre la route m’a poussée à accentuer les qualités que j’appréciais chez moi, et à travailler les défauts que je voulais voir disparaître. C’est inévitable. Un tempérament stressé s’estompera de toute évidence, sans quoi le voyage risque fort de virer au cauchemar. Un caractère égoïste n’aura à l’inverse d’autre possibilité que celle de s’ouvrir davantage aux autres, ou l’aventure sera bien solitaire. Une tendance à manquer d’assurance s’effacera peu à peu : avaler chaque jour des kilomètres de bitume renforce considérablement l’estime de soi.
Sur les routes du monde, seule avec moi-même, j’ai donc appris à m’écouter, me respecter et même un peu à m’aimer.
Croire en soi :
Depuis le début, mon voyage se déroule paisiblement, sans trop d’accrocs, mais je connais tout de même quelques galères, le lot quotidien de toute aventure. Ces dernières sont le piment de ma journée, les étincelles qui me tiennent éveillée. L’essentiel n’est pas d’éviter les problématiques qui se posent à moi, mais bien d’apprendre à les résoudre, par mes propres moyens et en vivant l’instant le mieux possible.
C’est en ayant une certaine maturité sur le contrôle de mes actes et de mes pensées, que je parviens aujourd’hui à ne subir presque aucun mauvais moment. À chaque problème sa solution, en espérant ne pas avoir à régler trop de soucis à la fois. Si une pointe de stress survient malgré tout, j’ai appris à m’assoir, relativiser, réfléchir, et prendre mon temps. La clé du problème apparaît d’elle-même, et tout redevient limpide, car je crois désormais en moi.
Je crois en mon instinct, en mes facultés d’adaptation, et en mes capacités à raisonner rapidement et de façon pragmatique. Je ne suis pourtant pas différente des autres, vivre sur la route est à la portée de chacun. L’asphalte m’a seulement faite mûrir et m’a poussée dans mes retranchements, me forçant à comprendre que oui, je suis capable d’affronter chaque journée sereinement. Je sais aujourd’hui que je peux prendre la route en comptant sur moi.
Faire ses propres choix :
Choisir de prendre la route vers le Nord ou vers le Sud ? Rester avec telle personne ou poursuivre son chemin ? Dormir ici ou là-bas ? Les décisions à prendre sont indénombrables. Chacune a ses conséquences, bonnes ou mauvaises. Un mauvais choix dans l’achat de nourriture peut vite nous mettre l’estomac sans dessus-dessous. Une erreur de lecture sur un plan et c’est tout un itinéraire qui doit être planifié à nouveau, à mois que sortir des sentiers battus ne soit finalement pas une si mauvaise idée ? Un jugement erroné et une confiance accordée trop vite, allez hop, on repart sans son sac… Décider, vite et bien, c’est que ce m’a enseigné la route. Probablement la meilleure école de la vie que j’ai pu trouver.
Quand nous ne savons pas où la vie nous mène, nous ne sommes jamais perdus.
Tiré de L’espionne, un livre de Paolo Coelho
Assumer mes choix, et faire en sorte que quels qu’ils soient, je puisse être en mesure d’en retirer quelque chose de bien : c’est le moyen de vivre mon aventure sous un angle positif. Nul ne commet aucune erreur. Être en capacité de penser qu’au final, ce n’est pas si grave et que ça pourrait être bien pire, savoir me remettre en question et apprendre de mes échecs, tout cela m’aide à aller chaque jour un peu plus loin. Et puis surtout, transformer les moments difficiles en de bons souvenirs : la clé du bonheur !
Prendre la route et devenir qui l’on souhaite :
Et un beau matin, je me suis réveillée en me disant que je n’allais pas au bout de cette envie de partir loin et de mon rêve de liberté. Trop de pudeur, un brin de lâcheté, étouffée par le poids de ces normes sociales qui me poussaient à me conformer à ce que l’on attendait de moi. J’ai toujours voulu être une nomade, vivant avec peu, arpentant les rues et allant à la rencontre du monde, ma guitare sur le dos. Mais cela ne se fait pas dans notre société. C’est trop utopique, naïf et surtout inutile, puisque dans cette configuration on ne produit rien.
Ce même matin, je me suis reposé la question du pourquoi de mon voyage. C’est sentir le vent de la liberté qui m’est apparu à l’esprit en premier. Alors j’ai levé mon pouce, j’ai sauté dans la première voiture qui s’est arrêtée et je suis partie en ville. J’ai acheté une guitare, petite, d’un beau bleu, et j’ai quitté le magasin, avec un grand sourire au coin des lèvres, et accessoirement un nouveau compagnon de voyage sur le dos.
Ce jour-là dans les rues paisibles de Mbabane, pas un passant n’a omis de se retourner sur mes pas. Autour de moi devait sûrement flotter un parfum de bonheur, qui se répandait allégrement. J’ai entendu, dans un anglais bancal, mon premier « Yo sister ! Can you play for me ? » Je me suis assise sur des marches poussiéreuses, j’ai accordé mes six cordes, et je me suis lancée.
En quelques secondes, j’ai connu mon premier attroupement. Ici, une femme blanche qui s’assoit et qui se met à chanter, ça ne court pas les rues. Les téléphones de contrefaçon sont sortis des poches, et tous se sont mis à filmer, et à se prendre en portrait derrière moi. J’ai alors su que mon voyage prenait un nouveau tournant. J’avais à ma disposition un nouveau moyen, pour créer un lien différent avec les habitants. Depuis, j’ai développé mes habiletés à jouer de la musique dans la rue, en emportant de préférence mon accordéon diatonique.
La liberté que je cherchais encore n’était donc pas si loin. Elle était juste là, sous mes yeux. Il me fallait seulement prendre la route et aller à sa rencontre…
Et vous, tout plaquer et partir loin, ça vous tenterait ? Pour en savoir plus sur le sujet, je vous invite à retrouver tous les articles sur la philosophie de ma vie nomade, ainsi que l’intégralité de mes récits de voyage !
très joli ce poème écrit lors de ton escale à l’aéroport de Panama
tu es vraiment douée ! … bravo ma Rouma
gros bisous et bonne continuation
Merci 🙂 Gros gros bisous depuis le Chili!!!