Mon road trip en Turquie, renversante aventure, s’est achevé sur une note heureuse, et c’est avec émotion que je viens de franchir la frontière grecque, marquant mon entrée tant attendue en Europe. Un avant-goût de retour aux sources, puisque c’est la sixième fois que j’ai la chance de traverser ce pays, cette terre hellénique que j’aime et qui m’est chère. L’an passé, j’y ai ainsi séjourné trois mois, l’occasion pour moi de revenir aujourd’hui fouler ce sol auquel je suis tant attachée. Voici le carnet de route de mon voyage en auto-stop en Grèce, d’Alexandroupoli à Patras, en passant par Athènes et Kalamata…
Athènes, retour en Europe :
L’histoire commence alors que je quitte Istanbul, laissant derrière moi une ville fabuleuse, mais également José, à qui je présente mes adieux une nouvelle fois. Une jeune femme me récupère en bord de route, et effectue un détour de plusieurs centaines de kilomètres pour me conduire au poste frontalier, malgré mon insistance pour me débrouiller seule : un dernier contact avec ce peuple turc fraternel, à l’image de ce que nous avons pu vivre ici ces dernières semaines. Un parfait gentilhomme m’achemine ensuite en banlieue Nord de Thessalonique, à trois cent bornes de là. La nuit est à son apogée, tout comme le froid qui ne me laisse aucun répit. Moi qui pensais que faire de l’auto-stop en Grèce serait synonyme de douce oisiveté, j’avais négligé le fait qu’ici, en hiver, les nuits peuvent être fraîches.
N’ayant désormais ni tente ni duvet au fond de mon sac à dos, il me faut braver le sommeil et trouver un véhicule susceptible de me permettre de rejoindre la sortie Sud de la ville, ce qui sera finalement possible grâce à trois albanais, qui me prennent en sympathie. Ces derniers décident même de téléphoner à un ami routier, en partance pour Athènes, et organisent notre rencontre sur un parking situé à quelques kilomètres de là.
Bien que l’homme en question se révèle vite être un mufle, je suis tirée d’affaire pour la nuit : bercée par ses indélicatesses et ses goujateries, j’avance à ses côtés et jusqu’au matin en direction de la capitale grecque, dont je franchirai les portes, les traits tirés mais le sourire aux lèvres, après vingt-six heures de trajet. Rentrer en Europe, c’est retrouver une latitude de mouvement qui m’avait manquée, et mes premières heures de vagabondage dans Athènes sont placées sous le signe de la liberté. De l’Acropole à certains quartiers plus hermétiques, je passe ainsi plusieurs jours à redécouvrir les secrets de cette ville qui compte parmi les plus vieilles au monde.
Entre de délicieuses pitas souvlakis avalées sur le pouce, aux abords du marché central, et quelques frappes quotidiens me remettant d’aplomb, je profite de mon séjour sur place pour faire un peu d’URBEX, et me lance dans l’exploration d’un gigantesque complexe olympique abandonné (galerie photo à venir).
Nathalie, une copine allemande rencontrée à Ürümqi (capitale du Xinjiang, en Chine), me rejoint ensuite pour passer quelques jours en ma compagnie, et nous en profitons pour faire de longues promenades le long du littoral, tout en satisfaisant notre curiosité au sujet des derniers potins. Enfin, après une semaine de bonheur ensoleillé, je me résous à reprendre la route et file plein Sud, en direction de Kalamata.
Megali Mantineia, home sweet home :
Le hasard a voulu qu’avant même de rejoindre Diane, une belle amitié de voyage qui compte parmi mes rencontres les plus marquantes – il s’agit de ma mamie de cœur qui m’accueille tous les ans depuis 2012 – je déambule devant la maison d’Annette et de Jean-Marie, foyer sur lequel j’ai veillé trois mois l’an dernier. Lucky, leur ténébreux labrador ébène, lové dans l’herbe, m’apostrophe : je sonne à l’improviste, afin d’embrasser mes grosses boules de poils adorées. En fin de compte, je passe tout l’après-midi à papouiller mes petits chérubins.
Quelques heures plus tard, je rejoins finalement Diane avec émotion, et reprends mes marques dans son habitation hors du commun : elle vit dans une yourte depuis plus d’une décennie et a su, au fil du temps, métamorphoser son lopin étagé en un empyrée romantique et romanesque.
Nous passons une semaine à flâner, radieuses, le nez au vent, ravies de nous revoir après une longue année de séparation. En effet, de toutes les mamans du monde que j’ai eu la chance de côtoyer sur ma route, Diane tient une place toute particulière. De nombreux camarades nous invitent à siroter un café ou partager un repas, et les jours défilent à une vitesse prodigieuse. Cette sympathique parenthèse me permet de reprendre pied en douceur avec l’Europe, et je me prépare désormais à effectuer la dernière ligne droite.
Avec Yorgos, un ami débordant d’imagination, nous planifions une virée à Aghios Theodoros et y découvrons une drôle de chapelle, dont la toiture est recouverte d’arbres sans qu’aucune racine ne soit visible (mais je vous conterai l’histoire de ce miracle une autre fois). Pas un soir, nous n’omettons de festoyer dans l’une des illustres tavernes grecques, où sur notre table la liqueur de Bacchus pleut à verse : les carafons de vin atterrissent miraculeusement sur notre nappe en papier encore immaculée, toujours accompagnés d’un galant clin d’œil de la part de nos compagnons de noces.
C’est la saison des olives à Kalamata et la vie locale tourne désormais, et comme chaque année en cette saison, autour de l’or grec. Dans le village, les discussions vont bon train, mêlant prévisions météorologiques au cours de l’huile en vigueur. À cet instant, je prends conscience que mon amour pour la Grèce est tellement intense, que je fais vœu de m’y établir dans les années à venir.
Patras, l’Italie à portée de pouce :
Après avoir banqueté outrageusement avec mes complices retraités, il est temps pour moi de gagner l’extrémité Ouest du pays : je compte prendre le bateau à Patras afin de me rendre directement en Italie, et une seconde bande de compères grecs, des étudiants cette fois, m’attendent avec hâte. Comme lors de chacun de mes séjours sur place, je séjourne chez Gina, une amie proche qui avait voyagé quelques semaines avec moi l’an passé, dans mon camion aménagé.
Cette dernière me rejoint d’ailleurs à Amaliada, car elle compte profiter de ma venue pour tenter sa première expérience d’auto-stop en Grèce, virée qui se révèle épique, ses débuts le pouce en l’air sont agités. Trimballées à l’arrière d’un pick-up, rebondissant sur nos séants endoloris, nous recevons de grosses paires de claques joyeusement balancées à nos figures par de violentes bourrasques. Je lui promets et le lui jure : le stop, c’est généralement moins ébouriffant.
Arrivées à bon port, nous rattrapons le temps perdu, avec elle et les siens. Faisant la nouba, trinquant aux pintes de Mythos, nous nous gavons de cette amitié qui continue de grandir au fil du temps. En Grèce, je me sens déjà chez moi, les olives et les gyros en plus. Gina et moi édifions au passage de vastes projets pour l’an prochain : nous nous rêvons déjà demain, sur les chemins du monde, les sacs pendus à nos épaules. Sans trop en dévoiler pour le moment, je peux d’ores et déjà révéler que 2018 sera une année sportive, singulière, et je l’espère palpitante.
Enfin, la boule au ventre mais les yeux rieurs, je m’élance en direction d’Orléans, pour un dernier trajet placé sous le signe des coïncidences, à compter qu’elles existent. Sur le ferry traversant l’Adriatique, je recroise Marco, un routier grec qui m’avait fait vivre, sur cette même mer et trois ans auparavant, une extraordinaire aventure en bateau-stop : nos impensables retrouvailles sont émouvantes et nous nous délectons de l’instant.
Par ailleurs, deux français voyagent en même temps que moi sur le submersible, ils me proposent de me conduire jusqu’à la frontière franco-italienne. Ayant plusieurs fois tenté avec difficulté de faire de l’auto-stop en Italie, je suis réellement heureuse de recevoir ce grand coup de pouce du destin et de plus, mes deux compères s’avèrent être d’excellents compagnons de voyage.
Pour finir en beauté, je retrouve ensuite José, ma vieille canaille, qui m’attend à Nîmes chez son père. Ensemble, nous achevons notre épopée débutée en Thaïlande il y a déjà neuf mois. Le pouce en l’air sur la A71, nous sommes récupérés par un écrivain voyageur, Monsieur Marc Leclerc du Sablon, qui vient de publier Pourquoi Jérusalem, récit relatant son périple à pied de Vannes jusqu’en Terre Sainte, un ouvrage qu’il nous fait le plaisir de nous offrir, en nous quittant à Bourges. Cette ultime et symbolique rencontre nous ouvre en grand les fenêtres de nos rêves, dévoilant de nouveaux horizons, et c’est sur cette dernière touche de magie que nous échouons, une heure plus tard et après avoir été charriés par plus de 35000km de bitume, boueux, éreintés et la cervelle débordant de souvenirs, au cœur de ma terre natale…
C’est lorsqu’on prend un aller-retour qu’on fait les choses à moitié.
Sylvain Tesson
Conseils pour faire de l’auto-stop en Grèce :
La Grèce a plutôt mauvaise réputation en matière de stop. Pourtant, j’ai traversé le pays le pouce en l’air à plusieurs reprises, et cela a toujours été d’une facilité déconcertante. Coup du destin, ou mauvaise publicité, difficile à dire, mais toujours est-il que pour José, l’aventure fut plus compliquée. Voici toutefois quelques conseils, qui je l’espère permettront à celles et ceux qui souhaitent faire de l’auto-stop en Grèce de mettre toutes les chances de leur côté :
- L’itinéraire et l’état des routes : Le réseau routier principal grec est en bon état, et les routes étant peu nombreuses, il est difficile de se perdre. Toutefois, si vous décidez de sortir des sentiers battus, il est possible que vous rencontriez des routes non pavées, mais faire du stop reste tout à fait faisable.
- La communication : Quelques grecs parlent anglais, parfois allemand (peu en dehors des zones touristiques), il est cependant hautement recommandé de connaître le vocabulaire de base. Les formules de politesse sont faciles à apprendre, et feront plaisir, à coup sûr, à vos différents conducteurs !
- Où dormir : Si vous planifiez actuellement un voyage en auto-stop en Grèce (ou en bus, le train n’étant pas performant), n’oubliez pas de réserver à l’avance votre hôtel afin de bénéficier du meilleur prix, ou jetez un œil au site AirBnB et obtenez une réduction de 25€ pour toute première réservation en passant par mon lien. Au cas où vous préféreriez camper, sachez qu’en Grèce, sauf indication contraire, vous pourrez installer votre tente sur n’importe quelle plage, et que vous serez toujours (ou presque) les bienvenus.
- La police : Je n’ai jamais eu de problème avec la police grecque, mais sachez que comme partout en Europe, il est interdit (et dangereux) de faire du stop directement sur l’autoroute. Installez-vous plutôt au péage ou sur les aires de service, ce qui sera bien mieux pour vous, comme pour les conducteurs. Aussi, il est défendu de franchir la frontière entre la Grèce et la Turquie à pied (trouver un véhicule qui vous fera passer n’est pas compliqué, il y a beaucoup de routiers et les douaniers sont cordiaux).
- L’argent : Jamais on ne m’a demandé d’argent lors de mes différents voyages en auto-stop en Grèce. Au contraire, les grecs m’ont régulièrement offert un café : soyez très vigilants, ils risquent bien de vous kidnapper à votre tour pour aller boire un verre !
- Le matériel : Pour vous lancer, pas besoin d’équipement spécifique. Cependant, pour faciliter votre aventure, n’hésitez pas à apporter avec vous un marqueur de qualité (voire une ardoise Velleda, pour écrire de jolis panneaux), un gilet jaune réfléchissant et une lampe de poche puissante (pour la nuit), un long chèche (qui sert à peu près à tout), une discrète sacoche de sécurité (pour ranger votre passeport et votre argent), une housse imperméable (pour votre sac, selon la saison), un chargeur portable (utile si vous utilisez beaucoup Maps Me) ainsi que l’indispensable livret G’Palémo (guide illustré permettant de vous faire comprendre aisément si vous ne parlez pas grec).
- Autres ressources sur le stop : Pour plus d’informations, je vous invite à découvrir mon guide complet et gratuit pour faire du stop, ainsi que mes états d’âme d’auto-stoppeuse, et plus généralement tous mes articles sur l’auto-stop.
- La Grèce : J’ai déjà publié plusieurs posts sur la Grèce, susceptibles de vous intéresser. Notamment visiter Kalamata ainsi que devenir pet sitter, et un retour sur mon expérience de trois mois de pet sitting. D’autres articles sont en cours de préparation !
Et pour aller encore plus loin, n’hésitez pas à retrouver l’intégralité de mes récits de voyage, ceux spécifiques à la région des Balkans, ainsi que tous les articles concernant mon tour du monde, et la philosophie de ma vie nomade.
Enfin, si vous avez eu l’occasion de tester l’auto-stop en Grèce, je vous laisse partager avec nous votre expérience dans les commentaires ci-dessous !
Salut!
De magnifiques histoire que tu partage ici et de nombreuses informations utiles. Je suis actuellement à Brindisi et je vais passer en Grèce. Le bateau stop risque d’être compliqué vu la saison mais je vais tenter de trouver un routier pour obtenir son second sésame pour la Grèce. Igoumenitsa ou Patras, pas d’importance.
Je vais faire ouest a l’est en stop au maximum pour rejoindre la Turquie, j’espère qu’avec tes conseils et ma ptite étoile ça va fonctionner !
La bise 😉
Salut Moustache et merci pour ton message ! J’espère que ta bonne étoile ne t’a pas quitté et que tu as pu entrer en Turquie comme tu le souhaitais alors ! Bon vent, et au plaisir 🙂
Bon retour en France, passe de belles fêtes de fin d’années, et vivement 2018 pour de nouvelles aventures!
Merci beaucoup pour ton message! Je te souhaite une belle année 🙂 Au plaisir!
sympa cet article, belle histoire
Merci pour ton message !
Quelles extraordinaires coïncidences ces rencontres avec Marco le routier sur le bateau et Marc Leclerc du Sablon l’écrivain sur la A 71 …
à lundi, grosses bises
Oui c’était dingue ! Gros bisous 🙂